Nicolas Pierlot : "Paris/Décembre". Textes et photos. / Route du travail du mec

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Un café
Route du travail du mec

Je vais au boulot tranquille en traversant la campagne à foie gras, par de petites routes tirant au hasard d'un village à l'autre.
De grandes demeures retiennent le temps à l'époque des chevaux biologiques. Leurs façades, brûlées au soleil de mille étés, prolongées en vastes tonnelles tressées de vigne, s'offrent aux lumières nouvelles du printemps.
Le soleil sans masque et les tourbillons de mon sillage dissipent la fraîcheur matinale.
Il fait bon, personne ne m'obstrue les virages.
Des moutons glandent en leur pré, quelques clébards moulent et se chauffent, de fraîches mouches renaissent d'un hiver larvé.

Peu à peu, la campagne et la rosée s'estompent, je dépasse des maisons éparses, des quartiers fonctionnels, des français empressés. De rond point en cassis, j'écrase quelques piétons et rejoins les rocades.
Il fait un temps superbe sur Toulouse, la température de mon moteur est de cinquante degrés, la visibilité est excellente.

Mais me voici déjà dans le parking où j'ai le droit de stationner. Un dernier regard au sommet des grands arbres qui balaie le ciel bleu montagne, et je soumets ma carte magnétique à la porte qui m'identifie et m'introduit dans le grand hangar aveugle où je mourrai jusqu'au soir.

Au soir, je retrouverai mon cheval, le vent, le nid, mon amour et son fruit.

[2001]